Translate

samedi 21 septembre 2013

Autre mythe: le devoir de réserve

Décidément, il y a beaucoup de mythes relatifs au métier d'enseignant et la pédagogie n'en a pas l'exclusivité. L’actualité nous renvoie au mythe concernant le statut des fonctionnaires, à savoir le supposé devoir de réserve des enseignants.

Beaucoup d’enseignants connaissent Jacques Risso, pour son talent de dessinateur et son humour, mais aussi comme directeur de l’école de Rustrel, connue par beaucoup d’entre nous pour son site de ressources gratuites fort bien achalandé.

Ce directeur vient d’être suspendu sans vraiment savoir pourquoi. Officiellement, le motif serait de n’avoir pas su gérer une situation de harcèlement entre élèves. Ce serait bien le seul directeur au monde à avoir été suspendu pour une telle raison, un jour de rentrée, qui plus est. Cela pousse à considérer la raison officieuse de cette mise à l’écart, à savoir  les dessins qu’il publie sur son blog et qui témoignent d’un certain esprit critique à l’égard de l’Education Nationale.

http://jacques.risso.free.fr/allegro/manontroppo.htm

Qu’est-ce à dire ? La liberté d’expression aurait-elle été subrepticement abolie pour les enseignants ? La hiérarchie ne serait-elle pas au courant que le devoir de réserve des fonctionnaires n’a plus cours, comme l’a bien expliqué Anicet Le Pors dans un article de 2008, toujours d’actualité. Le fonctionnaire a seulement un devoir de discrétion, relatif à tout ce qui dont il prend connaissance dans son exercice, que cela émane de particuliers ou concerne des sujets reconnus comme confidentiels par la hiérarchie.

En 1983, la loi a fait du fonctionnaire un citoyen comme les autres alors qu’il était jusqu’alors un "fonctionnaire sujet". [1] L’article 6 de la loi du 13 juillet 1983  le rappelle : «  La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires. »

Les dessins de Jacques Risso n’outrepassent en rien le devoir de discrétion : ils s’appuient sur des réalités connues de tous et en montrent les travers. Ainsi, nous suivons depuis 2004 la bureaucratisation maladive de l’Education Nationale, la détérioration des conditions d’exercice du métier de directeur et d’enseignant, l’usine à gaz des projets d’école, le jargonnage "Ed Nat", les conditions salariales, les réformes diverses, l’évaluation des enseignants, la formation, et bien sûr la refondation de l’Ecole.

Il ne reste plus qu’à espérer que les rumeurs circulant sur les véritables causes de cette suspension soient infondées car ce serait le symptôme d’une démocratie en péril et le signe que les fonctionnaires de l’Etat auraient perdu leur statut de citoyen à part entière.








[1]  Dans les années 1950, Michel Debré en donnait cette définition : " Le fonctionnaire est un homme de silence, il sert, il travaille et il se tait ",

dimanche 15 septembre 2013

L'Enseignement Explicite en 10 points


  1. L’Enseignement Explicite s’appuie sur les données probantes (evidence based practice). À savoir de nombreuses études de terrain menées dans les classes, devant des publics variés (âges variés, élèves en difficulté, élèves performants) pour des matières complexes, dans des contextes culturels variés ; ces études se penchent aussi sur  les effets à long terme. L’Enseignement Explicite est  validé par les études en psychologie cognitive, notamment celles relatives à l’architecture et à la charge cognitive (Sweller).
  2. Il appartient à la famille pédagogique instructionniste : il s’agit d’une transmission directe et structurée des connaissances et habiletés. L’efficacité du modèle explicite, structuré et fortement guidé  par rapport aux approches de découverte a été mise en évidence par  Clark, Kirschner, Sweller (Mettre les élèves sur le chemin des apprentissages).
  3. Ce n’est pas une approche exclusiviste. Les partisans de l’enseignement explicite ne disent pas que c’est la seule méthode efficace. C’en est une. Pour autant, ils ne considèrent pas que tout se vaut en pédagogie ; certaines méthodes sont efficaces, d’autres moins, d’autres pas du tout. Ce n’est pas une opinion mais le résultat d’études de terrain à grande échelle.
  4. Ce n’est pas de l’enseignement traditionnel ni magistral. L’enseignement explicite use du dialogue plus que du monologue. La façon de mener les leçons est complètement différente, il ne s’agit en aucune manière d’un cours magistral suivi d’exercices. L’enseignant, qui n’est pas au centre, vérifie sans cesse la compréhension et implique fortement les élèves dans les apprentissages. Il utilise fréquemment la rétroaction. Se reporter ici pour plus de détails.
  5. Il est basé sur le Dire. Il s’agit de rendre explicites toutes les situations d’apprentissage : annonce des intentions, des objectifs visés, de ce que l’on attend précisément des élèves sur un plan cognitif. Mais aussi de rendre explicites les connaissances dont ils auront besoin pour y agréger les nouvelles. Tout est dit, rien ne reste dans l’implicite ou l’intuitif.
  6. Il est basé sur le Montrer. L’enseignant raisonne devant les élèves, il leur montre les stratégies qu’il utilise. Il met un haut-parleur sur sa pensée. Toutes les tâches sont effectuées devant les élèves, y compris celles relatives à la gestion de classe ou à la gestion matérielle.
  7. Il est basé sur le Guider. En effet, il aide les élèves à expliquer leur raisonnement, à le mettre en mots de manière claire. Il fournit une rétroaction à chaque correction afin que les erreurs ne s’ancrent pas dans l’esprit des élèves. Il offre des soutiens permettant de guider les élèves pendant les apprentissages et leur évitant une surcharge cognitive. Le guidage est présent fortement au début puis il s’amenuise jusqu’à ce que la pratique soit  fluide.
  8. S’applique à la gestion de classe et à la gestion de matière. La méthode explicite s’utilise pour la gestion de la matière et pour la gestion de classe. Les habitudes de travail, la méthodologie, les règles de classe sont aussi enseignés de manière explicite et pratiquées jusqu’à la maîtrise.
  9. Les leçons sont conduites sur un modèle qui a fait ses preuves : Préparation (annonce des objectifs, des tâches attendues, du déroulement, rappel des prérequis) Modelage, Pratique guidée, Pratique autonome, synthèse.
  10. Les révisions occupent une place importante afin d’ancrer durablement les connaissances et habiletés.