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mercredi 5 février 2014

Les invariants pédagogiques (de l'Enseignement Explicite)


En 1964, C. Freinet publiait ses invariants pédagogiques ou valeurs scolaires  qu’il disait inattaquables et sûrs et sur lesquels il basait sa pratique. Je ne doute pas des convictions profondes ni de la sincérité des ambitions de Freinet pour une école qu’il voulait juste, mais nous savons aujourd’hui l’inanité de son modèle sur le plan pédagogique.

L’idée des invariants ou principes incontournables sur lesquels va venir s’installer une pratique pédagogique est à mon sens nécessaire. Toute pratique pédagogique s’appuie sur un certain nombre de conceptions qui en constituent une sorte de boussole.

Enseigner consiste à opérer un changement : s’il est réalisé correctement, les élèves doivent quitter l’école en sachant plus de choses qu’à leur arrivée. C’est pourquoi on ne peut pas considérer l’enseignement à proprement parler comme une science, une science consistant dans un premier temps à décrire et à comprendre le monde. Néanmoins, l’enseignement est en lien direct avec la science dans le cadre de la définition de ses pratiques. Il s’en inspire afin de ne pas intégrer des actions contre-productives par rapport aux apprentissages. Par exemple, les sciences cognitives nous disent les limites de la mémoire de travail ; ainsi, les pratiques la mettant en surcharge doivent être proscrites. D’autres domaines scientifiques contribuent à nourrir les pratiques pédagogiques. Par ailleurs, la science peut intervenir aussi par l’évaluation des pratiques et méthodes. Le plus célèbre exemple reste le projet Follow Through mais il y en a d’autres.

L’enseignant s’appuyant sur des principes fondamentaux peut être comparé à l’architecte. L’architecte doit tenir compte des lois fondamentales de la construction s’il veut que son édifice tienne debout. À côté de cela, la science lui propose également un panel d’autres outils qui lui permettront de réaliser l’objectif particulier qu’il s’est fixé ; en tant qu’expert, il sera capable de choisir les meilleurs moyens.

L’enseignement explicite, qui fait partie des méthodes efficaces, a été bâti sur un certain nombre de principes fondamentaux que je me propose de citer ci-dessous. Ils sont incontournables. En les gardant à l’esprit, l’enseignant évite de se lancer dans des actions pédagogiques contre-productives.

Contrairement aux invariants de Freinet, purs produits d’une idéologie personnelle, les fondements de la pratique explicite sont issus de la recherche et font partie des données probantes. Ils ne relèvent en rien d’opinions ou d’idées politiques. On est donc en droit de les qualifier de sûrs et inattaquables sur le plan pédagogique.
 L’élève
  • L’élève est un enfant.
  • Un enfant n’est pas un adulte en miniature.
  • Tout élève est capable d’apprendre.
  • Si l’élève n’apprend pas, c’est que le maître n’a pas bien enseigné.
L'enseignant
  • Il est responsable des apprentissages.
  • C’est un professionnel : il choisit les moyens de son action, moyens sélectionnés par le rapport à l’efficacité. Il est au courant de la recherche sur les effets des pratiques.
  • Il est capable d’interagir dans toute situation pédagogique.
  • Il assume son autorité de statut.
  • Il est le garant du respect des règles de classe.
  • Il établit les règles de classe.
La pratique pédagogique
  •  L’enseignant connaît la différence entre enseigner et apprendre.
  • Il met d’abord en œuvre la gestion de classe afin d’installer les comportements nécessaires aux apprentissages.
  • Les comportements sont enseignés et pratiqués explicitement.
  • Il connaît les principes de l’architecture cognitive et les dangers de la surcharge cognitive.
  • Son but est d’opérer un changement dans la mémoire à long terme.
  • Il vérifie que les connaissances pré-requises sont maîtrisées.
  • Il procède par étapes de difficultés progressives.
  • Il part du simple pour aller vers le complexe.
  • II s’attache à la compréhension et à la mémorisation.
  • Tout est expliqué clairement, rien n’est laissé dans l’ombre.
  • Il explique en « mettant un haut-parleur sur sa pensée ».
  • Il est dans le dialogue et non dans le monologue.
  • Il propose une pratique abondante, d’abord guidée puis autonome.
  • Il pose de nombreuses questions.
  • Il conçoit ses actions en pensant à éviter toute surcharge cognitive.
  • Il fait pratiquer de fréquentes révisions.
  • La synthèse occupe une place importante dans le déroulé de la leçon.
  • Il fait corriger les erreurs immédiatement, il apporte un feedback.
  • Il n’avance pas tant que la notion étudiée n’est pas acquise par 80% des élèves.
  • Il prévoit des actions spécifiques pour ceux qui n’ont pas compris.
  • Il pratique les encouragements positifs avec abondance.
  • Il ne piège pas les élèves et leur demande des tâches pour lesquelles ils ont les moyens de répondre.
  • Il favorise l’esprit dynamique des élèves.
  • Il sait que la lecture est le produit du déchiffrage par la compréhension.
  • Il sait l’importance des habiletés phoniques et combinatoires dans l’acquisition du déchiffrage.
  • Il propose des évaluations diagnostiques, formatives, sommatives.

Je ne vais pas pasticher Freinet en proposant une grille d’auto-évaluation relative à l’appropriation de ces principes. Il me semble que la lecture seule de ces éléments, formulés à dessein de manière brève et explicite, permet à tout un chacun de réfléchir à sa propre pratique et peut-être de chercher à en savoir plus. C’était le seul but de cette énumération.










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