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dimanche 6 avril 2014

L'Enseignement Explicite, pour une école plus juste

Benoît Hamon, notre nouveau ministre de l’Éducation Nationale a dit vouloir s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur en tâchant de faire aussi bien que lui. Je comprends que les enseignants ou parents d’élèves ayant commencé à faire les frais de la réforme Peillon soient inquiets. Mais pouvait-il dire autre chose ?

Je préfère retenir sa volonté annoncée de faire en sorte "qu'il n'y ait pas d'ordre social immuable, que personne ne soit assigné à résidence sociale et que toutes les familles puissent avoir la chance d'offrir à leurs enfants les conditions optimales de réussite." 

Je vais donc faire comme si j'étais beaucoup plus jeune et prête à croire les intentions d'un homme politique. Notre ministre souhaite que l’école permette à chacun, quelle que soit son origine sociale, de réussir. Au passage, je remarque tout de même qu’il dit réussir et non pas s’instruire. Mais ne pinaillons pas.

Il y aurait donc de quoi être optimiste. Compte tenu de l’état de la recherche, des données probantes disponibles à tout un chacun, personne ne peut ignorer l’existence de méthodes pédagogiques efficaces, y compris pour les élèves issus de milieux culturellement défavorisés. Il suffirait ainsi de les faire connaître aux enseignants, et de former ceux-ci à leur pratique. Une bonne formation initiale mais aussi continue et hop, en route vers une école plus juste.

C’est ici qu’intervient l’Enseignement Explicite, qui fait partie des méthodes avérées efficaces pour tous. Pourquoi est-ce une méthode plus juste socialement ? Parce qu’elle ne compte pas sur la culture que l’enfant possède en dehors de l’école, parce qu’elle ne compte pas sur l’aide éventuelle de la famille pour faire avancer l’enfant. L’Enseignement Explicite part du niveau réel de l’enfant et le suit pas à pas en s’assurant que chacune des étapes est bien acquise. En enseignement explicite l’enfant n’est jamais lâché devant une tâche complexe, on commence par les notions simples, il est toujours accompagné par l’enseignant, beaucoup d’abord, puis de moins en moins ; par conséquent, il n’est jamais tenté de baisser les bras. Il est étroitement associé à son avancement. Les succès de l’Enseignement Explicite en milieux défavorisés ont été observés dans les classes. Il a d’ailleurs vu le jour suite à un questionnement consistant à observer les pratiques des enseignants qui obtenaient des résultats auprès d’élèves en difficultés. Les données sur le fonctionnement du cerveau confirment cette efficacité : ainsi les procédures de l’Enseignement Explicite tiennent compte de l’architecture cognitive et en particulier des limites de la mémoire de travail, veillant à ne pas provoquer de surcharge cognitive ; il procède par étapes progressives, explique clairement et sans ambiguïté fournit une pratique abondante, d’abord guidée puis autonome, de nombreuses révisions, des corrections immédiates et raisonnées. Il ne laisse jamais les élèves devant une tâche complexe qu’ils n’ont pas les moyens cognitifs de résoudre. Tout cela contribue à faire acquérir les connaissances et habiletés de manière durable.

Par ailleurs, on ne peut ignorer les conclusions d’une récente revue de recherche ou méga-analyse menée par  Gauthier, Bissonnette, Richard, Bouchard : c’est une synthèse de 362 recherches menées sur une période de 40 ans concernant plus de 30 000 élèves. La question initiale était : Quelles sont les stratégies d’enseignement efficaces favorisant les apprentissages fondamentaux auprès des élèves en difficulté de niveau élémentaire? L’étude conclut que "que les stratégies pédagogiques associables à l’enseignement structuré et directif sont celles à privilégier auprès des élèves en difficulté et à risque d’échec." Le constructivisme quant à lui, apparaît dans cette étude comme ayant des effets inférieurs à ceux attendus pour prétendre à l’efficacité. De fait, c’est une méthode pédagogique extrêmement élitiste par laquelle seuls les élèves issus de milieux culturellement favorisés ont une chance de réussir (mais encore faudrait-il se pencher sur la nature profonde de cette réussite). Le paradoxe qui dure depuis des décennies est que malgré les preuves accablantes, malgré les déclarations d’intentions et autres mantras, les méthodes inefficaces issues du constructivisme ont toujours pignon sur rue.

Il faudrait donc à notre nouveau ministre une volonté profonde de faire changer les choses associée à une personnalité hors du commun pour résister aux divers lobbies qui se battent pour l’idéologie constructiviste et contre l’introduction en éducation des données probantes associées à la notion d’efficacité. Une fois de plus, let’s wait and see … sans grande illusion néanmoins.
  





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