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vendredi 13 octobre 2017

Daniel Willingham : éléments pour une lecture aisée

Daniel Willingham s'intéresse à la compréhension en lecture. Pour présenter l'ouvrage qu'il est en train de publier, il a réalisé plusieurs vidéos, résumant les points essentiels pour parvenir à cette compréhension. Voici la première.

 1/ La lecture est une technique récente




Sur le plan de l’évolution, la lecture est récente, elle n’a pas plus de 6000 ans. C’est pourquoi les chercheurs qui veulent connaître les processus utilisés par le cerveau lors de la lecture, pensent que ceux-ci ne sont pas encore spécialisés pour cela. Ainsi, ils cherchent des processus plus anciens, qui se seraient adaptés ou seraient en voie d’adaptation. En effet, c’est ainsi que procède le cerveau quand il doit résoudre un problème complexe : il utilise toutes ses ressources et les adapte. Beaucoup de gens pensent que la compréhension en lecture repose sur un processus spécifique, alors que ce n’est pas le cas. Elle utilise tous les éléments nécessaires à la compréhension du langage en général. C’est sur cela que repose le procédé.
En conséquence, si vous êtes un bon décodeur, le langage écrit est assez similaire au langage oral en termes de compréhension. Cela signifie par conséquent que si nous boostons chez les enfants la compréhension de la langue orale, alors la compréhension de l’écrit s’améliorera aussi. C’est pourquoi il est important de lire à haute voix aux enfants, même quand ils sont devenus lecteurs. Comme il est important de travailler sur la compréhension de la langue orale, plus généralement. 

   2/ Les phonèmes sont ambigus





La difficulté dans l’apprentissage du décodage est qu’une même lettre ou groupe de lettres peuvent avoir plusieurs sons. Tout comme un son peut avoir plusieurs graphies. Par exemple le son [o] peut s’écrire : -o, -au, -eau, -ô. Ou alors, la graphie-ent, qui peut se prononcer [ã] ou [ə] comme dans ferment lactique, et, ils ferment la porte. Le cerveau n’est pas si mauvais que ça pour réaliser des associations entre des éléments auditifs et visuels. C’est le même type d’association que nous faisons pour nous souvenir des noms des personnes. Mais il y a dans le processus quelque chose qui peut être difficile : c’est l’audition des phonèmes. Il semblerait que nous ne soyons pas équipés à l’origine pour entendre les phonèmes individuellement. Comment le savons-nous ? Nous avons fait des tests sur des adultes n’ayant pas appris à lire. Par exemple, en leur demandant, dans le mot stop de retirer le son [s] et de prononcer ce qui reste. Ils en sont incapables. Alors qu’ils sont capables de faire la même chose en retirant une syllabe entière (Ex : retirer [ma] du mot – maman). Un autre problème qui apparaît est que chaque phonème ne se prononce pas exactement de la même manière Cela dépend des accents des individus mais aussi du contexte dans lequel se trouve le phonème. Par exemple, la lettre -p selon, qu’elle sera initiale ou à l’intérieur du mot ne donnera pas exactement le même son. Mais nous prétendons qu’il s’agit du même son. C’est pourquoi la reconnaissance des phonèmes est difficile et peut poser problème dans l’apprentissage du décodage.

3/ Un élément de la lecture s'acquiert par auto-apprentissage



Nous n'avons pas seulement une représentation du son des mots, nous savons aussi à quoi ils ressemblent globalement. La question qui se pose est de savoir comment fait le lecteur pour acquérir cette représentation mentale de l'aspect du mot. Dès que nous voyons un mot, nous sommes capables de l'identifier sans passer par le décodage. Au début, nous décodons, parfois plusieurs fois, puis l'identification devient automatique et globale. Les chercheurs ont réalisé une expérience  sur des lecteurs experts. Un groupe devait lire des virelangues, en silence alors qu'un autre groupe lisait d'autres phrases sans difficulté particulière de prononciation. On a alors remarqué que les lecteurs de virelangues mettaient plus de temps à lire que les autres. Cela montre que même les lecteurs experts ont encore recours au décodage en fonction des circonstances. 

4 / Le sens de chaque mot est ambigu



Une autre difficulté de la lecture réside dans les différents sens que peut avoir un mot, ou plutôt toutes les nuances contextuelles. Il en est ainsi de la plupart des mots d'une langue. Mais notre esprit est capable d'utiliser les indices pertinents pour déduire le sens exact. Il y a une idée courante sur le sens des mots, qui consiste à penser que, lorsque nous lisons un mot, nous nous référons à une sorte de dictionnaire mental que nous avons en mémoire pour en extraire le sens. Ce n'est pas une bonne façon d'aborder la chose car cela sous-entendrait que le sens serait toujours le même. Dans son ouvrage, Daniel Willingham décrit le processus complexe qu'utilise le cerveau pour trouver le sens à partir des indices contextuels. 


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